tu vides ton coeur comme si de rien n’était où que tu sois c’est impossible de te répondre tu ne vois plus personne tu te perds tu t’emmêles tes récits des petits étonnements incessants de chaque jour tu parles toute seule à voix haute tu commences tout en même temps tu sais étinceler te faire admirer te faire belle tu avances sur le fil du mur tu fais comme pour te blesser te bloquer tu ne sais pas ce qui va tenir tu profites de ta force tu joues de la masse de ton corps tu refuses d’être vulnérable tu perds tout contrôle ta colère tu fuis tu reportes tes faiblesses sur les autres ta barbarie ta lourdeur ton indécision tu ments tu supposes que ça passera tu t’arranges avec la bonne conscience tu ne veux plus revenir en arrière regarder la déception le désarroi tu effondres l’intimité la plus grande tu fais naître recouvrir le doute sur tout ce que tu veux vraiment sur tout ce que tu as donné tout à coup tu disparais t’esquives tu tu te figes tu te recroquevilles tu n’approches plus personne

j’oublie ma viscérale méfiance je ne veux plus rien préméditer répéter anticiper j’oublie je ne vois plus l’impossible je ne vois plus tes semblants je laisse tes fuites je sais laisser ta violence s’éteindre attendre m’interposer avant ta blessure je ne veux pas te soigner te porter pas accepter je peux te perdre je t’oublie pour longtemps plus ta liberté ton âme en moi je ne veux pas te sauver plus régler de compte je peux t’interrompre reprendre ma lenteur ma lourdeur je sais me faufiler à travers ton diable je te retrouve si belle je sais encore me tenir dans l’ombre t’admirer je ferme les yeux de te laisser tenir me traverser je peux ne plus je peux ne plus te reconnaitre serrer la secrète la plus ancienne coïncidence l’espérance première de te serrer de te trouver je sais négliger la lâcheté je peux maintenant aller jusqu’à la fin je peux aborder n’importe qui et confier aussitôt le plus cher je ne te remplace pas

 

 

 


Précipite-toi, 2010

 

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Installation, charbon

 

EMMANUEL ARAGON


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